Sermons 2022

Les défis du Calife Abou Bakr

Dans son sermon du 11 mars 2022, Sa Sainteté le Calife a évoqué les grands dangers auxquels le premier Calife de l'Islam était confronté.

Sermon du vendredi 11 mars 2022, prononcé par Sa Sainteté le Calife, Hadrat Mirza Masroor Ahmad, à la mosquée Moubarak, à Islamabad, Tilford au Royaume-Uni. Après le Tashahoud, le Ta’awudh et la Sourate Al-Fatiha, Sa Sainteté le Calife a déclaré :

[J’évoquais] les difficultés rencontrées par Abou Bakr (r.a.) après [son élection] comme Calife. La première était la peine causée par la mort du Prophète (s.a.w.). Les musulmans en étaient certes fort tristes, mais ce fut Abou Bakr (r.a.) qui en souffrait le plus, étant donné qu’il était un ami d’enfance du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.).

De plus, sa loyauté [était exemplaire] et personne d’autre n’avait saisi comme lui la profondeur de l’allégeance [au Prophète Muhammad (s.a.w.)]. Mais en ces instants, il fit preuve d’un grand courage et d’une foi inébranlable.

On dit que la première étape critique et terrifiante fut le choc de la mort du Prophète (s.a.w.) qui rendit tous les Compagnons fous de chagrin. Ils avaient tous perdu la tête, en raison de cette mort soudaine. Personne n’aurait pu imaginer cette séparation d’avec l’Envoyé d’Allah (s.a.w). Sa mort était si bouleversante, si tragique, que de grands compagnons avaient perdu la raison à cause du chagrin. Même l’homme courageux qu’était ‘Oumar (r.a.) était mal loti en raison de cette folie.

Son épée à la main, il annonçait qu’il décapiterait quiconque annonçait que Muhammad (s.a.w.) était mort. En entendant cela, les musulmans étaient dans un dilemme quant à savoir si le Prophète (s.a.w.) était réellement mort ou pas. Ces amoureux du Prophète (s.a.w.) étaient sur le point d’oublier la leçon fondamentale de l’unicité de Dieu pour annoncer que le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) n’aurait jamais pu mourir et qu’il n’était pas mort. C’est alors qu’Abou Bakr (r.a.) est entré dans la mosquée du Prophète et s’est adressé à l’assistance, en disant :

من کان منكم یعبد محمدا فان محمد قد مات ومن کان منكم یعبد الله فان الله حی لا یموت

« Quiconque adorait Muhammad (s.a.w.), qu’il sache que Muhammad (s.a.w.) est mort, et quiconque aimait Allah devrait se réjouir, car Allah est vivant et ne meurt jamais. » Malgré l’immense amour qu’il avait pour le Saint Prophète (s.a.w.), un amour inégalé, il a rappelé l’unicité divine. Il a ensuite déclaré :

وَمَا مُحَمَّدٌ إِلَّا رَسُولٌ قَدْ خَلَتْ مِنْ قَبْلِهِ الرُّسُلُ أَفَإِنْ مَاتَ أَوْ قُتِلَ انْقَلَبْتُمْ عَلَى أَعْقَابِكُمْ

« Et Muhammad n’est qu’un Messager. En vérité, (tous) les Messagers avant lui ont trépassé. Alors, s’il mourait ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos pas (et abandonneriez-vous l’islam) ? »

De cette manière, Abou Bakr (r.a.), avec beaucoup de courage et de sagesse, a renforcé la volonté des compagnons dans cet état de chagrin et il a pansé leurs blessures. D’autre part, il a rétabli l’édifice chancelant de l’unicité divine.

Le Messie Promis (a.s.) déclare à ce propos : « Abou Bakr (r.a.) a dissipé, devant une grande assemblée, tous les malentendus qui avaient persisté chez certains compagnons au sujet de [la continuité de] la vie du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) en citant un verset. De même, il a déraciné l’idée erronée qui avaient perduré dans le cœur de certains parce qu’ils n’ont pas médité profondément sur les hadiths évoquant la vie de Jésus-Christ. »

Après avoir dissipé et surmonté ce traumatisme, la deuxième tâche majeure d’Abou Bakr (r.a.) était d’unifier l’Oummah musulmane au moment de l’élection du Califat.

Après la mort du Prophète (s.a.w.), un autre danger possible a surgi avec le rassemblement des Ansâr à la Saqifah des Banou Sa’idah. Au début, il semblait que les Ansâr n’étaient pas prêts, pour une raison ou une autre, à nommer l’un des Mouhajirîn comme leur Emir ou Calife. De même, les Mouhajirîn n’étaient pas prêts à choisir l’un des Ansâr comme Calife. Les débats étaient sur le point de dégénérer en joutes à l’épée. En ces instants périlleux, Allah a fait naître dans la langue d’Abou Bakr (r.a.) un effet particulier ; d’autre part, il a tourné le cœur des gens vers Abou Bakr (r.a.) tant et si bien que toute cette confusion et discorde se sont transformées en amour et en unité, une fois de plus.

Le Messie Promis (a.s.) explique en effet que les enfants d’Israël ont écouté les paroles de Josué, fils de Noun, après la mort du prophète Moïse et qu’il n’y a pas eu de différends entre eux et tous ont fait preuve d’obéissance. Il en fut de même dans le cas d’Abou Bakr (r.a.) : tous, avec des larmes dans les yeux en raison du départ du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), ont accepté de plein gré le califat d’Abou Bakr (r.a.).

La troisième grande épreuve confrontant le Calife Abou Bakr (r.a.) – tâche à laquelle il s’est attelé – était le départ de l’armée d’Ousamah.

Le Prophète (s.a.w.) avait préparé cette armée pour combattre les Byzantins à la frontière syrienne. Après la bataille de Mawta et de Tabouk, le Prophète (s.a.w.) craignait que les Byzantins n’envahissent l’Arabie en raison des différences croissantes entre l’islam et le christianisme et de la sédition des Juifs. Au cours de la bataille de Mawta, Zayd, Ja’far, ‘Abdoullah Ibn Rawaha, trois émirs musulmans, sont tombés en martyrs l’un après l’autre. Mawta est une ville située dans une région fertile à l’est de la Jordanie. Anas raconte : « Le Prophète (s.a.w.) a informé le peuple de la mort de Zayd, Ja’far et ‘Abdoullah Ibn Rawaha, avant que le peuple n’en ait eu des nouvelles. Il a déclaré : « Zayd a pris le drapeau et il est tombé en martyr. Ensuite Ja’far a pris le drapeau et il est lui aussi tombé en martyr. ‘Abdoullah Ibn Rawaha l’a pris et il est également tombé en martyr. » Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) avait des larmes aux yeux lorsqu’il annonçait ces nouvelles. Puis il a dit : « Enfin, l’une des épées d’Allah (c’est-à-dire Khalid Ibn Al-Walid) a pris le drapeau, tant et si bien qu’Allah lui a accordé la victoire sur ces adversaires. »

Par la suite, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) est parti pour Tabouk avec les musulmans. Mais l’ennemi n’a pas osé sortir sur le champ de bataille et combattre les musulmans. Il a préféré se mettre à l’abri, à l’intérieur de la Syrie. À la suite de ces expéditions, les intentions des Byzantins envers les musulmans sont devenues très dangereuses et ils se sont préparés à avancer sur la frontière arabe. C’est pourquoi le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) avait ordonné à Ousamah de partir pour la Syrie par précaution. Un des objectifs était de venger les martyrs de la bataille de Mawta. Les préparatifs de l’armée d’Ousamah ont pris fin le samedi, soit deux jours avant le décès du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.). Les préparatifs avaient débuté avant qu’il ne tombât malade. À la fin du mois de Safar, il avait demandé aux musulmans de se préparer à combattre les Byzantins. Il a fait venir Ousamah et lui a dit : « Rends-toi là où ton père est tombé en martyr et foule ce lieu avec tes chevaux. Je t’ai choisi comme commandant de cette armée. »

Selon un autre récit, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) avait déclaré : « Piétine sous les sabots [de tes chevaux] les lieux dit Balqa et Daroun. » C’est-à-dire : ces gens veulent se battre – il faudra les combattre férocement.

Balqa est une région de la Syrie située entre Damas et la vallée d’Al-Qoura. Daroum est un lieu situé en Palestine sur la route menant en Egypte. Ce sont là les détails concernant ces lieux.

Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a déclaré : « Le matin, lance l’attaque contre les habitants d’Oubna, qui se trouve tout près de Balqa en Syrie. Voyage rapidement et atteins l’ennemi avant qu’il ne soit au courant de ta venue. Si Allah t’accorde le succès, reviens vite. Prend des guides et envoie au-devant de toi des informateurs et des espions. » Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a attaché, de ses mains, un drapeau pour Ousamah et lui a dit : « Fais le Jihad, au nom d’Allah, dans Sa voie. Mène le combat contre celui qui rejette Allah. » Ousamah est parti avec le drapeau et l’a confié à Bouraydah Ibn Al-Housayb. L’armée s’est réunie à Jourf, située à trois miles de Médine.

Tous les Mouhajirîn et Ansâr avaient été invités à prendre part à cette bataille dont Abou Bakr, ‘Oumar, Abou ‘Oubaydah Ibn Al-Jarrah, Sa’d Ibn Abi Waqqâs, Sa’id Ibn Zayd, Qatadah Ibn Al-Nou’man et Salama Ibn Aslam. Certains ont objecté contre le fait qu’un jeune soit placé à la tête des grands compagnons parmi les premiers émigrés. Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a été fort en colère d’entendre ces commentaires : il s’est couvert la tête d’un mouchoir, il s’est enveloppé dans son manteau avant de monter sur la chaire, pour déclarern après avoir loué Dieu : « J’ai entendu les critiques de certains des vôtres sur le commandement d’Ousamah. Vous critiquez mon choix d’Ousamah comme commandant tout comme vous m’aviez critiqué pour avoir choisi son père dans le passé. Par Dieu ! Zayd Ibn Al-Harithah possédait les aptitudes pour commander et après lui son fils possède lui aussi les mêmes aptitudes. Il était de ceux que j’aimais le plus ; et certainement tous deux méritent le bien. Je souhaite le bien pour Ousamah, car il est parmi les meilleurs d’entre vous. »

Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a prononcé ces paroles le samedi du dix du mois de Rabi’Al-Awwal, c’est-à-dire deux jours avant son décès. Les musulmans qui devaient accompagner Ousamah ont souhaité adieu au Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) pour se joindre à l’armée à Jourf. La maladie du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) s’est aggravée, mais il a insisté que l’armée d’Ousamah parte. Le dimanche, les souffrances du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) se sont davantage aggravées. Quand Ousamah est retourné dans les rangs de l’armée, l’Envoyé d’Allah s’est évanoui. Ce jour-là, on lui a offert des médicaments. Ousamah a baissé la tête pour embrasser le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) : celui-ci n’a pas pu parler, mais il a indiqué vers le ciel avec ses mains et les a posées sur la tête d’Ousamah. »

Celui-ci déclare : « J’ai compris que le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) priait pour moi. » Il est ensuite retourné vers l’armée. Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a repris connaissance le lundi ; il a dit à Ousamah de partir avec les bénédictions d’Allah. Ousamah a quitté le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) et a ordonné aux soldats de s’apprêter à partir. Au même moment, Oumm Ayman, sa mère, a envoyé quelqu’un pour l’informer que le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) vivait ses derniers moments et que son état s’était aggravé. En entendant cette nouvelle, Ousamah, accompagné d’Oumar et d’Abou ‘Oubaydah s’est présenté au Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) pour constater qu’il vivait en effet ses derniers moments. Le lundi 12 Rabi’oul-Awwal, après le coucher du soleil, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a rendu l’âme ; l’armée musulmane campée à Jourf est rentrée à Médine. Bouraydah Ibn Al-Housayb a planté le drapeau d’Ousamah devant la porte du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.).

Selon un récit, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) est décédé quand l’armée d’Ousamah était à Dhi Khouchoub, une vallée menant de Médine à la Syrie.

En tout cas, après le serment d’allégeance à Abou Bakr, celui-ci a ordonné à Bouraydah de reprendre le drapeau et de se rendre chez Ousamah pour lui demander de se mettre en route pour son objectif. Bouraydah a pris le drapeau pour se rendre au premier lieu [de campement] de l’armée.

Le nombre de cette armée est estimé à trois mille et selon un autre récit, Ousamah Ibn Zayd a été envoyé en Syrie avec sept cents hommes.

Selon un rapport, le lendemain du décès du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), Abou Bakr a annoncé : « La mission d’Ousamah sera accomplie. Tous ceux qui font partie de son armée ne doivent pas demeurer à Médine et il leur faudra tous partir la rejoindre à Jourf. »

Après le décès du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), presque toutes les tribus, importantes ou pas, de l’Arabie se sont rebellées et ont été coupables d’hypocrisie. Les Juifs et les chrétiens se dressaient et tentaient leur chance. Avec le décès du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), et en raison de leur nombre inférieur et de la supériorité numérique de l’ennemi, les musulmans étaient comme des chèvres et des moutons [abandonnés] par une nuit de tempête. En somme, ils étaient seuls et sans soutien.

Certains ont dit à Abou Bakr : « Ces gens considèrent que l’armée d’Ousamah est l’unique armée des musulmans ; et comme vous pouvez le voir, les Arabes se sont rebellés contre vous. Il n’est donc pas approprié pour vous de séparer ce groupe de musulmans du vôtre. » C’est-à-dire d’envoyer l’armée d’Ousamah.

Sur ce, Abou Bakr (r.a.) a déclaré : « Je jure par Celui qui détient mon âme, même si je suis sûr que les bêtes me dévoreront, je respecterai le décret du Messager d’Allah concernant l’armée d’Ousamah ! »

Selon un autre récit, Abou Bakr (r.a.) aurait déclaré : « Je jure par Celui en dehors Duquel il n’y a pas de divinité ! Même si les épouses bénies du Messager d’Allah (s.a.w.) sont traînées par les pieds par des chiens, je ne rappellerai pas cette armée et je ne délierai pas non plus le drapeau que le Prophète (s.a.w.) a attaché. »

Hazrat Mouslih Maw’oud (r.a.) déclare : « Lorsque le Saint Prophète (s.a.w.) est décédé, toute l’Arabie a apostasié. Des hommes courageux à l’instar d’Oumar et d’Ali ont pris peur face à cette sédition. Le Prophète (s.a.w.) avait préparé une armée pour attaquer la région byzantine quelque temps avant sa mort et avait nommé Ousamah comme son commandant. L’armée n’était pas encore partie lorsque le Prophète (s.a.w.) a rendu l’âme ; et quand les Arabes ont apostasié à sa mort, les Compagnons ont pensé que si l’armée d’Ousamah part envahir le territoire byzantin, face à une telle révolte il ne restera que les vieux, les enfants et les femmes et Médine sera sans protection. Ils ont suggéré que certains grands compagnons se présentent au Calife Abou Bakr (r.a.) et qu’ils lui demandent de retenir l’armée jusqu’à ce que la rébellion s’apaise.

Ainsi ‘Oumar et d’autres grands compagnons se sont présentés au Calife et ont fait cette demande. Quand Abou Bakr (r.a.) a entendu cela, il a répondu avec colère à cette délégation : « Voulez-vous que la première action du fils d’Abou Qouhafa après la mort du Prophète (s.a.w.) soit d’arrêter l’armée à laquelle le Prophète (s.a.w.) avait ordonné de partir ? Il a déclaré : « Je jure par Dieu que si les armées de l’ennemi entrent à Médine et traînent les corps des femmes musulmanes, même là je n’arrêterai pas l’armée que le Saint Prophète (s.a.w.) avait décidé d’envoyer. »

Ce courage est né en Abou Bakr (r.a.) parce que Dieu avait dit :

مُحَمَّدٌ رَسُولُ اللَّهِ وَالَّذِينَ مَعَهُ أَشِدَّاءُ عَلَى الْكُفَّارِ

À l’instar d’un simple fil connecté à l’électricité, qui génère une grande puissance, il en était de même des compagnons qui sont entrés en contact avec le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) : ils ont été durs envers les mécréants.

Dans son livre Sirr-oul-Khilafah, le Messie Promis (a.s.) écrit ceci à propos du départ de l’armée d’Ousamah : « Dans ses chroniques, Ibn Al-Athir a écrit que lorsque l’Envoyé d’Allah (s.a.w) est décédé et que la nouvelle de sa mort a atteint la Mecque et son gouverneur ‘Attâb Ibn Asîd, celui-ci a disparu et la Mecque a tremblé. Ses habitants étaient sur le point d’apostasier. Il écrit que les Arabes ont apostasié et dans chaque tribu il y a eu des apostats chez les gens ordinaires ou les élites. L’hypocrisie s’est manifestée. Les juifs et les chrétiens ont commencé à soulever leurs têtes. En raison de la mort de leur Prophète, de leur nombre inférieur et de la multiplicité des ennemis, les musulmans étaient comme des moutons ou des chèvres abandonnés par une nuit pluvieuse.

Les gens ont dit à Abou Bakr (r.a.) : « Les gens considèrent que l’armée d’Ousamah est l’unique armée des musulmans et comme vous pouvez le voir, les Arabes se sont rebellés contre vous. Il n’est donc pas approprié pour vous de séparer ce groupe de musulmans du vôtre. »

Sur ce, Abou Bakr (r.a.) a déclaré : « Je jure par Celui qui détient mon âme. Même si je suis sûr que les bêtes me dévoreront, je respecterai cet ordre du Messager d’Allah concernant l’armée d’Ousamah et l’enverrai certainement. Étant donné que la décision a été prise par le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), je ne pourrai l’abroger. »

En somme il a maintenu tel quel l’ordre du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) et l’a mis en application. Il a ordonné aux compagnons qui faisaient partie de l’armée d’Ousamah de partir rejoindre les rangs de l’armée.

Abou Bakr a déclaré : « Tout individu faisant partie de l’armée et à qui le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a ordonné de rejoindre ses rangs ne restera pas en arrière. D’ailleurs, je ne lui donne pas la permission de rester en arrière. Il lui faudra partir, même s’il doit s’y rendre à pied. » Et pas un seul n’est resté en arrière. L’armée s’est préparée à partir de nouveau. Vu la situation critique, certains compagnons ont encore une fois conseillé de ne pas envoyer l’armée dans l’immédiat. Selon un récit, Ousamah aurait demandé à ‘Oumar de conseiller au Calife Abou Bakr d’annuler l’ordre de départ afin qu’ils s’occupassent des apostats afin de protéger le Calife et la famille du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), ainsi que les autres musulmans, des attaques des polythéistes. En sus de cela, certains Ansâr ont demandé à ‘Oumar de conseiller à Abou Bakr, le Calife du Prophète d’Allah, de remplacer Ousamah par un commandant plus âgé, s’il insiste sur l’envoi de l’armée. Quand ‘Oumar a présenté [leur avis] et celui d’Ousamah à Abou Bakr, celui-ci a répliqué fermement : « Même si des chiens et des loups me déchirent, j’appliquerai cet ordre du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) et je ne le changerai pas. Même si je suis abandonné et laissé seul, j’appliquerai sa décision. »

Sur ce, ‘Oumar (r.a.) a déclaré : « Les Ansâr souhaitent qu’un commandant plus âgé qu’Ousamah soit nommé. »

En réponse à cela, Abou Bakr (r.a.) qui était assis, s’est levé et l’a saisi par la barbe en disant : Ô fils de Khattab ! Que ta mère soit privée de toi ! C’est le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) qui a choisi Ousamah comme commandant, et tu me demandes de l’écarter ? » ‘Oumar (r.a.) est revenu vers les gens et ils lui ont demandé ce qui s’était passé. Oumar (r.a.) leur a dit : « Allez vous-en ! Que vos mères soient privées de vous ! » C’est-à-dire qu’il a exprimé son mécontentement et a ajouté : « Aujourd’hui, à cause de vous tous, je n’ai reçu rien de bien du Calife du Messager d’Allah. » C’est-à-dire qu’Abou Bakr (r.a.) a été furieux contre lui.

Quand l’armée d’Ousamah s’est réunie à Jourf en accord aux ordres d’Abou Bakr, celui-ci s’est rendu sur place pour examiner les troupes et pour dresser leurs rangs. Le départ a offert un spectacle fort étonnant. Ousamah était sur sa monture tandis qu’Abou Bakr était à pied. Ousamah a déclaré : « Ô Calife du Prophète d’Allah ! Hissez-vous sur la monture ou [permettez-moi] d’en descendre. » Abou Bakr a répondu : « Par Allah ! Tu ne descendras pas et je ne montrai pas non plus ! Pourquoi ne devrais-je pas salir mes pieds pendant quelque temps dans la voie d’Allah ? Quand le guerrier marche, il mérite sept cents récompenses, son statut est élevé sept cents fois et sept cents de ses défauts sont effacés. »

Abou Bakr (r.a.) a dit à Ousamah (r.a.) : « Si tu le juges approprié, permets à ‘Oumar (r.a.) de rester car il peut m’aider dans mon travail. » Ousamah (r.a.) en a donné la permission.

Après cet incident, à chaque fois qu’Oumar rencontrait Ousamah, il s’adressait à lui en ces termes, même après son élection comme Calife : « Que la paix soit sur toi, ô Emir ! »

Étant donné qu’Oumar (r.a.) avait fait partie de son armée, il lui disait : « Que la paix soit sur toi, ô Emir ! »

Ousamah répondait : « Qu’Allah t’accorde Son pardon, ô Emir des croyants! »

Abou Bakr a prodigué ces conseils à l’armée : « Je vous conseille d’être conscients de dix choses. Ne soyez pas malhonnêtes ; ne volez pas le butin de guerre ; ne violez aucun pacte ; ne mutilez pas les morts (c’est-à-dire ne coupez pas leur nez ou leurs oreilles, ne crevez pas leurs yeux, ne défigurez pas leur visage) ; ne tuez aucun enfant, aucune personne âgée, ni aucune femme ; ne coupez pas de palmiers dattiers et ne les brûlez pas ; ne coupez pas les arbres fruitiers ; et n’abattez aucune chèvre, vache ou chameau, sauf ce que vous consommez. Vous rencontrerez certainement ceux qui se sont consacrés au culte dans les églises : ne les touchez pas. (C’est-à-dire ne toucher pas les moines et les prêtres chrétiens.)

Vous rencontrez d’autres qui vous offriront tout type de provisions dans leurs récipients. Mangez-en au nom d’Allah. »

C’est-à-dire qu’il ne fallait pas considérer interdit les repas offerts par des non-musulmans. Ils pouvaient en consommer en prenant le nom d’Allah.

« Vous allez aussi rencontrer un peuple qui s’est rasé le milieu de la tête et qui ont laissé des mèches de cheveux sur les côtés comme des bandages. Vous devriez utiliser vos épées pour les combattre. »

Il existe divers récits à propos de ceux-là. On dit qu’ils s’agissaient d’un groupe de chrétiens qui n’étaient pas des ermites, mais des chefs religieux et ils incitaient les gens à mener la guerre contre les musulmans et participaient également aux combats. C’est pour cette raison qu’Abou Bakr (r.a.) avait enjoint de ne pas toucher aux ermites qui se trouvaient dans les églises et qu’ils ne devaient pas se battre contre eux. Cependant, les musulmans devaient combattre ceux susmentionnées (qui incitaient à la guerre) et contre tous ceux qui se rangeaient de leur côté. Ils sont de ceux qui avaient déclenché la guerre et incité les autres.

Le Calife Abou Bakr (r.a.) a ajouté : « Partez maintenant au nom de Dieu, et puisse-t-il vous protéger de tous types de blessures et contre toutes formes de maux et de peste. »

Ensuite Abou Bakr a dit à Ousamah : « Accomplis tous ce que le Messager (s.a.w.) d’Allah t’a ordonné et n’y laisse aucune lacune. » Après cela, Abou Bakr (r.a.) a pris ‘Oumar (r.a.) et il est retourné à Médine. Abou Bakr (r.a.) a envoyé l’armée d’Ousamah Ibn Zayd (r.a.) vers la fin du mois de Rabi’Al-Awwal, en l’an 11 de l’Hégire. Selon un autre récit, il l’a envoyée au cours du mois de Rabi’Al-Thani, 11 de l’Hégire. Ousamah (r.a.) a voyagé pendant 20 nuits et a atteint les habitants d’Oubna et a lancé une attaque soudaine. Le slogan des musulmans était : « Ô Mansour, tue-les. » En d’autres termes, ils devaient tuer tous ceux qui étaient sortis pour les combattre. Suite à cela, celui qui les combattait était tué et celui qui était capturé était retenu prisonnier. Ousamah (r.a.) a ordonné à ses cavaliers de chevaucher sur leurs terres. Ousamah (r.a.) est ensuite resté occupé pour la journée à rassembler leur butin de guerre. Ousamah (r.a.) était monté sur Sabha, le cheval de son père, et il a attaqué et tué celui qui avait tué son père. Dans la soirée, Ousamah (r.a.) a ordonné aux soldats de lever le camp et suite à cela, il a accéléré le rythme de sa monture. Après avoir voyagé pendant neuf nuits, il a atteint la vallée d’Al-Qoura. Il a envoyé alors des messagers à Médine pour annoncer la victoire et le bien-être de l’armée. Après cela, il est parti de là et après six autres nuits, il a atteint Médine.

Lors de cette expédition, pas un seul musulman n’est tombé en martyr. Lorsque l’armée victorieuse est arrivée à Médine, Abou Bakr (r.a.) ainsi que les Mouhajirîn et les habitants de Médine sont sortis dans la joie pour l’accueillir. Ousamah (r.a.) est entré dans la ville monté sur le cheval de son père ; et Bouraydah Ibn Al-Husayb tenait le drapeau et chevauchait devant lui. En atteignant la mosquée du Prophète (s.a.w.), Ousamah (r.a.) a offert deux Rak’ât de prière, et ensuite il est rentré chez lui.

Selon divers récits, cette armée est revenue après avoir passé 40 à 70 nuits hors de Médine. En raison peut-être de l’amour qu’il vouait au Saint Prophète (s.a.w.), Abou Bakr (r.a.) a déclaré : « Il n’est pas possible que le fils d’Abou Qouhafah dénoue le drapeau que le Saint Prophète (s.a.w.) avait noué de ses propres mains. » Ainsi, au retour de l’armée d’Ousamah (r.a.), ce nœud n’a jamais été délié et le drapeau est resté dans la maison d’Ousamah (r.a.) jusqu’à sa disparition.

L’armée d’Ousamah (r.a.) a eu un impact très important et durable.

Premièrement, tous ceux qui croyaient fermement que l’armée d’Ousamah (r.a.) ne devait pas partir en raison des circonstances, ont compris à quel point la décision du Calife était opportune et bénéfique, et ils ont réalisé qu’Abou Bakr (r.a.) possédait une grande perspicacité, la sagesse et la prévoyance. Deuxièmement, en envoyant l’armée, il a établi la puissance des musulmans parmi les tribus d’Arabie, qui se disaient que si les musulmans n’avaient pas possédé une telle force, ils n’auraient jamais envoyé leur armée. Ils ont été très impressionnés par cela. Troisièmement, les nations non-arabes vivant aux frontières de l’Arabie, notamment les Byzantins, et qui surveillaient de près les musulmans, ont pris peur de ces derniers.

Les Byzantins se disaient d’une part que leur Prophète était décédé, et pourtant ils tentent d’attaquer leur pays. Sir Thomas Walker Arnold, érudit et orientaliste britannique de renom, écrit ceci à propos de l’armée d’Ousamah (r.a.) : « Après la mort de Muhammad (s.a.w.), Abou Bakr envoya l’armée d’Ousamah, que le Prophète (s.a.w.) souhaitait expédier en Syrie. Bien que certains musulmans s’y opposèrent en raison de l’état d’agitation en Arabie, Abou Bakr les fit taire avec sa déclaration suivante : « Je n’abrogerai aucun ordre émis par le Messager (s.a.w.) d’Allah, même si Médine est la proie de bêtes sauvages. Cette armée honorera très certainement le désir du Saint Prophète (s.a.w.). » Ce fut la première des expéditions extraordinaires à travers lesquelles les musulmans ont conquis la Syrie et l’Afrique du Nord, et ont mis fin à l’ancien royaume persan et ont également acquis les provinces les plus importantes qui appartenaient à l’Empire byzantin. »

De même, l’Encyclopédie de l’islam dit ceci à propos d’Ousamah : « Le Calife nouvellement élu, Abou Bakr a ordonné que l’armée d’Ousamah parte afin d’honorer le désir du Saint Prophète (s.a.w.), même si la rébellion avait éclaté parmi les tribus (en Arabie). Oussama est arrivé à Balqa, une région de la Syrie où Zayd avait été tué. Ousamah a attaqué la colonie d’Oubna. En raison de l’apostasie, les habitants de Médine étaient très inquiets, mais en apprenant la nouvelle de cette victoire, ils ont été ravis. Ainsi, cette expédition a acquis un statut beaucoup plus important par rapport aux autres expéditions et a été considérée comme un précurseur de la conquête de la Syrie. »

Un autre défi auquel Abou Bakr (r.a.) a dû faire face était la sédition causée par ceux qui refusaient de payer la Zakat. Lorsque la nouvelle de la disparition du Saint Prophète (s.a.w.) se répandit dans toute l’Arabie, les flammes de l’apostasie et de la rébellion s’allumèrent dans toutes les directions.

Le ‘Allamah Ibn Ishaq déclare : « Après la disparition du Noble Prophète (s.a.w.), toute l’Arabie a fait acte d’apostasie, à l’exception des habitants des deux mosquées, c’est-à-dire La Mecque et Médine. Après la disparition du Prophète (s.a.w.), les habitants de La Mecque sont restés protégés de l’apostasie. Voici les détails à ce propos. Souhayl Ibn ‘Amr, qui a accepté l’islam au moment de la conquête de La Mecque, a été fait prisonnier par les musulmans lors de la bataille de Badr alors qu’il était encore mécréant. Il avait un symbole marqué sur ses lèvres. ‘Oumar (r.a.) avait dit : « Ô Messager (s.a.w.) d’Allah ! Enlevez ses deux dents de devant là où il a marqué un symbole et de cette façon il ne pourra jamais rien prononcer contre vous. »

Le Saint Prophète (s.a.w.) a déclaré : « Ô ‘Oumar ! Laisse-le. Il est possible qu’un jour il soit dans une telle position que tu le loues. »

‘Oumar (r.a.) voulait le punir mais le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) l’en a empêché, disant qu’à l’avenir, il prononcerait des paroles qui le pousseraient à le louer.

Il déclare : « Cette occasion s’est produite lorsque le Prophète (s.a.w.) est décédé et que la foi des habitants de La Mecque a commencé à chanceler. Lorsque les Qouraychites ont vu les Arabes quitter l’islam et qu’Attab Ibn Asid Al-Oumawi, qui avait été nommé leur chef par le Prophète (s.a.w.), s’est caché, c’est là que Souhayl Ibn ‘Amr s’est levé et a prononcé un discours.

Il a déclaré : « Ô Qouraychites ! Étant les derniers à accepter l’islam, ne soyez pas les premiers à s’en détourner. Par Dieu, cette religion se répandra tout comme la lune et le soleil se lèvent à l’horizon et parcourent le ciel jusqu’à leur coucher. »

Ainsi, Souhayl a prononcé un long discours qui a eu un impact considérable sur les habitants de La Mecque et ils se sont retenus. Attab (r.a.), qui s’était caché, est revenu et les Qouraychites sont restés fidèles à l’islam.

Ceux qui ont quitté l’islam étaient de différents types. L’auteur d’une biographie d’Abou Bakr (r.a.) les décrit ainsi : « L’apostasie a pris diverses formes. Certains ont immédiatement abandonné l’islam et ont commencé à adorer des idoles. D’aucuns se sont prétendus prophètes, tandis que d’autres continuaient à adhérer à l’islam. Parmi eux, il y avait ceux qui observaient la Salât, mais avaient cessé de payer la Zakat. Certains se sont réjouis de la disparition du Prophète (s.a.w.) et sont retournés à leurs habitudes et actions de l’ère de l’ignorance. Certaines personnes étaient sous le choc et dans le doute et ont attendu de voir qui finirait par l’emporter. »

Ces différentes formes (d’apostasie) ont été expliquées par les divers spécialistes de l’histoire et de la jurisprudence. L’Imam Al-Khattabi dit qu’il y avait deux sortes d’apostats : les premiers furent ceux qui abandonnèrent la foi, quittèrent la nation et retournèrent à l’incrédulité. Il y avait deux sous-sections de cette faction : la première était de ceux qui avaient accepté Mousaylimah le Menteur et Al-Aswad Al-‘Ansi. Ils ont accepté leurs prétentions à la prophétie et ont rejeté la prophétie du Saint Messager (s.a.w.). La deuxième sous-section concernait ceux qui sont devenus des apostats de la religion de l’islam en rejetant les questions de la loi islamique telles que les prières et la Zakat et sont revenus à leur croyance du temps de l’ignorance.

Le deuxième type d’apostats était ceux faisant la différence entre les prières et la Zakat : ils avaient continué à prier tout en rejetant l’obligation de la Zakat, refusant de l’offrir au Calife. Parmi ceux qui s’étaient retenus de la Zakat, il y en avait qui souhaitaient l’offrir mais dont les chefs les en avaient empêchés.

La division des apostats présentée par le Qadi ‘Iyâd est la plus proche de cette réalité. Il a mentionné trois groupes : le premier était composé de ceux qui avaient adopté le culte des idoles ; le second était de ceux qui avaient suivi Mousaylimah le Menteur et Al-Aswad Al-‘Ansi – tous deux qui prétendaient être des prophètes – et le troisième étaient ceux qui étaient restés dans l’islam tout en refusant de payer la Zakat : leur interprétation était qu’elle n’était obligatoire que du vivant du Prophète (s.a.w.).

Le Dr Abdul Rahman déclare quant à lui qu’il y avait quatre types d’apostats : premièrement, ceux qui ont adopté le culte des idoles ; deuxièmement, ceux qui ont suivi les faux prétendants à la prophétie Al-Aswad Al-‘Ansi, Mousaylimah le Menteur et (la prophétesse) Sajâh ; troisièmement, ceux qui ont rejeté l’obligation de payer la Zakat ; et quatrièmement, ceux ne rejetant pas l’obligation de la Zakat mais refusant de l’offrir à Abou Bakr (r.a.).

Les tribus les plus importantes qui ont refusé de payer la Zakat étaient les ‘Abs et Zoubyan qui habitaient dans les alentours de Médine et dont les voisins étaient les tribus des Banou Kinanah, Ghatafan et Fazarah.

La tribu des Hawazin était chancelante et elle aussi avait refusé d’offrir la Zakat.

On trouve également une mention d’une consultation d’Abou Bakr (r.a.) avec les compagnons à propos de ceux qui avaient refusé de payer la Zakat. Abou Bakr (r.a.) avait réuni les illustres compagnons pour les consulter au sujet du combat contre ceux qui avaient refusé de la payer. Il s’agissait ici de ceux qui refusaient de payer la Zakat, mais qui se disaient encore musulmans. La majorité des musulmans, y compris ‘Oumar Ibn Al-Khattab (r.a.), étaient d’avis qu’on ne doit pas mener de combat contre ceux qui croient en Allah et en Son messager (s.a.w.), mais qu’ils doivent être inclus dans les efforts menés contre les apostats. Certains étaient d’avis contraire, mais ils étaient peu nombreux. Selon un récit, les compagnons avaient conseillé à Abou Bakr (r.a.) de ne pas les importuner, de gagner leurs cœurs, au point où ils soient imprégnés par la foi, et ensuite il sera possible de leur demander de payer la Zakat. Abou Bakr (r.a.) a rejeté cette proposition. Abou Bakr (r.a.) était d’avis de combattre ceux qui refusaient de payer la Zakat et de les contraindre à le faire. Sa conviction à ce sujet était si ferme qu’après cette discussion il déclara : « Par Allah ! Je combattrai ceux qui refusent de payer la Zakat et me refusent ne serait-ce qu’une corde qu’ils avaient l’habitude d’offrir au Saint Prophète (s.a.w.). » Ce récit est détaillé comme suit dans un récit d’Al-Boukhari. Abou Hourayrah (r.a.) a rapporté qu’Oumar (r.a.) avait déclaré : « Comment allez-vous combattre les gens alors que le Prophète (s.a.w.) avait déclaré :

« Il m’a été ordonné de combattre ces gens jusqu’à ce qu’ils proclament qu’il n’y a d’autres Dieu qu’Allah. Il préserve de ma personne la vie et les biens celui qui le proclame, sauf pour un droit qui est dû et ils devront en rendre compte à Allah. » Abou Bakr (r.a.) a répondu : « Par Dieu, je tuerai certainement celui qui distingue entre la Salât et la Zakat, car la Zakat est un bien qui est dû. Par Dieu ! S’ils refusent de me donner ne serait-ce qu’un agneau qu’ils avaient l’habitude d’offrir au Saint Prophète (s.a.w.), je les combattrai. » ‘Oumar (r.a.) a dit : « Par Allah ! Allah l’Exalté a ouvert le cœur d’Abou Bakr (r.a.). J’ai ainsi appris qu’il devait en être ainsi. » ‘Oumar (r.a.) a dû accepter plus tard qu’Abou Bakr (r.a.) avait raison.

Syed Zain-ul-Abidin Waliullah Shah écrit dans l’exégèse du Hadith « ‘Asama minni mâlahou illa bi-l-haq » que la clause « illa bi-haqqil-islam » apporte plus de lumière sur la question. Si après avoir déclaré « il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah », un musulman ne respecte pas les droits islamiques, il peut être tenu responsable. On n’est pas à l’abri de la punition seulement en professant sa foi. Bi-haqqil-islam peut comprendre deux sens : le premier concerne les droits dus selon les enseignements islamiques ; Haqq qui est une forme infinitive, peut également être pris au pluriel. Le second sens est que l’islam juge nécessaire de prendre cette richesse et ces vies : Haqqul-amr athbatahou wa awjabahou signifie que c’est nécessaire : ceci a été utilisé à la forme transitive. Le bien-être des membres de la société dépend du respect des droits. Tout comme le fait de ne pas payer l’impôt est considéré comme une rébellion qui mérite d’être puni, le refus d’offrir la Zakat l’est également. Au début, ‘Oumar (r.a.) n’était pas d’accord avec Abou Bakr (r.a.), mais lorsqu’il a entendu l’argument basé sur les mots illa bi-haqqihi, (sauf pour un droit qui est dû) il a accepté son point de vue. Cet incident montre que la simple déclaration « il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah » ne se traduit pas automatiquement par l’accomplissement de bonnes actions. Le sujet de ce chapitre est exposé dans le verset suivant :

فَإِنْ تَابُوا وَأَقَامُوا الصَّلَاةَ وَآَتَوُا الزَّكَاةَ فَخَلُّوا سَبِيلَهُمْ

Tout en répétant le sujet mentionné dans le verset ci-dessus, Allah le Tout-Puissant déclare dans le même chapitre :

فَإِنْ تَابُوا وَأَقَامُوا الصَّلَاةَ وَآَتَوُا الزَّكَاةَ فَإِخْوَانُكُمْ فِي الدِّينِ

« Mais s’ils se repentent, et observent la Prière, et paient la Zakat, alors ils sont vos frères en religion. » (9 : 11)

Ces mots prouvent que celui qui abandonne l’une de ces trois pratiques ne peut être considéré musulman. Les cinq piliers de l’islam sont obligatoires. En déclarant « sauf pour un droit qui est dû », le Saint Prophète (s.a.w.) lui-même a considéré que dépenser dans la voie d’Allah était un droit dû aux personnes les plus faibles de la société. En d’autres termes, il est obligatoire pour ceux qui ont les moyens de suivre les commandements de l’islam et de s’acquitter du devoir financier qui leur incombe. Cela aura également pour effet de protéger leurs droits. La conclusion à laquelle Abou Bakr (r.a.) est parvenu sur la base des mots illa bil-haqq montre sa profonde perspicacité. Selon Abou Bakr (r.a.), le refus d’offrir la Zakat est un acte de rébellion ; et celui qui n’offre pas la Zakat ne peut pas demeurer dans une société islamique, et il est nécessaire de faire la guerre contre eux à cause de leur rébellion. Même si l’islam a accordé la liberté en matière de religion en déclarant « il n’y a pas de contrainte en religion », une personne qui accepte l’islam de façon apparente, reçoit la sécurité en faisant partie d’une société islamique, dont elle jouit des avantages et des droits communs. Cependant, si une personne ne remplit pas les devoirs et obligations que l’islam a établis pour ceux qui font partie d’une société islamique, elle n’aura pas le droit de bénéficier de la protection communautaire et du droit à la sécurité. Il n’existe aucun gouvernement dans ce monde qui tolère les gens qui enfreignent la loi et les rebelles. Le système islamique de la Zakat et de l’aumône a trait à la société et non à l’individu. Ses résultats et ses impacts sont également liés à la société, et non à un individu. Selon une narration, à cette occasion, ‘Oumar (r.a.) a déclaré : « Ô Calife du Messager (s.a.w.) ! Gagnez le cœur des gens et faites preuve de bienveillance à leur égard ». Sur ce, Abou Bakr (r.a.) a répondu à ‘Oumar (r.a.) : « Tu étais très courageux à l’époque de l’ignorance, mais maintenant, à l’époque de l’islam, tu fais preuve de lâcheté ».

Je mentionnerai la prochaine fois Incha Allah les conséquences de la conduite de ceux qui refusaient de payer la Zakat, de la guerre menée contre eux et de son effet sur les musulmans et les autres.

Aujourd’hui, je voudrais encore une fois évoquer la situation du monde. Priez qu’Allah accorde la raison et le discernement aux gouvernements des deux côtés afin qu’ils cessent de faire couler le sang de l’humanité. En outre, les musulmans devraient tirer la leçon suivante de cette guerre : notamment comment tout (l’Occident) s’est uni. Or en dépit du fait qu’ils font la même profession de foi, les musulmans ne sont jamais unis. Ils détruisent un pays après l’autre : l’Irak, la Syrie et maintenant le Yémen. Ils le font par l’intermédiaire des autres et y participent aussi directement au lieu de se concerter. Les musulmans devraient au moins tirer leçon de l’unité de ces gens. Qu’Allah accorde Sa miséricorde aux nations musulmanes, à chaque musulman et à l’Oummah. Or, cette unité n’aura lieu que lorsqu’ils accepteront l’Imam de cette époque qui a été envoyé par Allah en cette ère dans ce but précis. Qu’Allah leur accorde sagesse et compréhension. En plus de se réformer, qu’ils prient aussi pour le monde et utilisent leurs moyens et leurs ressources pour empêcher le monde de sombrer dans la guerre, au lieu de s’y joindre.

Après les prières, je dirigerai une prière funéraire. La défunte [se nomme] Syeda Qaisara Zafar Hashmi : elle était l’épouse de Zafar Iqbal Hashmi de Lahore. Elle est décédée récemment. C’est à Allah que nous appartenons et c’est à Lui que nous retournerons. Elle était la petite-fille de Syed Muhammad Ali Bukhari (r.a.), un compagnon du Messie Promis (a.s.) et était la fille de Syed Nazir Ahmad Bukhari. Après son mariage, elle a vécu en différents lieux. Elle s’est mariée en 1961 et en 1981 elle a déménagé à Allama Iqbal Town, Lahore où elle a pu servir au sein de la Lajna Imaillah en tant que Présidente et également en tant que Secrétaire. Elle jeûnait et priait régulièrement. Elle était très dévouée, gentille, hospitalière, patiente, reconnaissante et était une femme pieuse et sincère. Elle avait un amour profond et une obéissance inconditionnelle envers le Califat. Elle était en première ligne dans les programmes financiers et faisait ses contributions au début de l’année. Par la grâce d’Allah, elle faisait partie du système d’Al-Wassiyah. Elle laisse dans le deuil son mari, cinq fils et une fille. L’un de ses fils, Mahmood Iqbal Hashmi, est actuellement prisonnier dans la voie d’Allah à Camp Jail à Lahore. Il n’a pas obtenu la permission de quitter la prison [pour les funérailles] mais l’administration a fait preuve d’indulgence en autorisant qu’on apporte le corps de sa mère à la prison, lui permettant ainsi de voir sa mère pour la dernière fois. Les ahmadis doivent faire face à des punitions sévères parce qu’ils suivent les traditions islamiques : ils ne sont pas autorisés à quitter la prison, même pour offrir des prières funéraires, tandis que de grands meurtriers peuvent le faire. En tout cas, qu’Allah ait pitié du gouvernement de ce pays. Une plainte a été déposée contre Mahmood Iqbal et trois de ses amis en juin 2019, après quoi ils ont été libérés sous caution, mais celle-ci a été révoquée en août 2021 et les tribunaux les ont renvoyés en détention. Qu’Allah créée rapidement les conditions de leur mise en liberté. L’un des petits-fils de la défunte, Asim Iqbal Hashmi, est un missionnaire ici au Royaume-Uni. Qu’Allah le Tout-Puissant lui permette de perpétuer les actions vertueuses de sa grand-mère et permette au reste de sa progéniture d’en faire de même. Qu’Allah fasse preuve de pardon à l’égard de la défunte.


(Le site www.islam-ahmadiyya.org prend l’entière responsabilité de la publication du texte de ce sermon)

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