Communiqués de presse

L’affaire Mohammed Merah : l’Islam entre mythes et réalités

Mohamed-Merah

L’Islam entre mythes et réalités [1]

Le fait est marquant, choquant, indignant, inhumain. Il semblerait même que, pendant un instant, la langue française manque de termes pour définir les contours précis de ce sentiment de profonde indignation. Voici qu’un extrémiste, Mohamed Merah, connu de plusieurs services de police internationaux pour ses penchants extrémistes, a tué, de sang froid, le mardi 20 mars, trois jeunes enfants, un professeur d’une école juive ainsi que trois membres de la caserne du 17e Régiment de Génie Parachutiste (RGP). Activement recherché, il fut retrouvé dans la banlieue de Toulouse puis abattu de plusieurs balles après l’assaut donné par le RAID, le 22 mars 2012.

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L’Islam contrefaçon

« Une idée vraie doit s’accorder avec l’objet qu’elle représente » écrivait Spinoza. Si Spinoza avait mesuré l’importance des piliers fondateurs communs à toutes les religions, il ne semble pas que Mohamed Merah ait mesuré le message ni même la philosophie des enseignements religieux Islamiques dont il se revendique être le martyr ! En abattant, de sang froid, ces trois jeunes enfants, ce professeur et les membres du Régiment des parachutistes c’est l’Humanité toute entière qu’il a heurtée, blessée, indignée. Ne savait-il pas que le Fondateur de l’Islam [2] a affirmé que « tuer un homme revient à tuer l’humanité toute entière » [3] ? Avait-il occulté ce sacro-saint verset du Coran, berceau de l’humanité, qui prévoit qu’il « n’y a pas de violence en religion » [4 ]? Comment peut-on se revendiquer, après avoir enlevé, au nom de la religion, la plus belle et précieuse lumière que Dieu ait insufflée à l’Homme d’en être son martyr ?

En réalité, ce qu’avait oublié Mohamed Merah c’est qu’il ne suivait pas les enseignements de l’Islam mais d’un islam ; un islam qu’il avait créé de toutes pièces, sans commune relation avec les doctrines laissées par son Fondateur. Pas plus qu’il ne suivait les magnifiques notions d’humanisme et d’absence de distinctions entre les religions ; pensant représenter le véritable courant de l’Islam, il n’en a présenté que le mouvement contrefait, le mouvement teinté de faux et d’inculture où la désinformation et l’absence de véritables connaissances sont les véritables maîtres mots de l’enseignement. Il a vendu l’Islam comme une vulgaire marchandise que l’on vend à la sauvette en la sachant illégale, comme une religion incitant à se parer d’un arsenal d’armes afin de semer la discorde entre les peuples et créer la division, comme une religion ne proclamant aucune égalité entre les peuples, quelles que soient leurs croyances.

Que ces lignes doivent être difficiles à lire pour les musulmans essayant, tant bien que mal, de se comporter comme des fidèles serviteurs de leur religion et vouant une ignominie sans pareil pour cette vulgaire marchandise contrefaite, ces armes et ces différences ; ces musulmans qui, se revendiquant fils d’Abraham, mettent en place des conférences interreligieuses, luttent contre les crimes de « races », les crimes contre l’humanité et contre toutes ces guerres fanatiques au nom des religions. En cette période douloureuse pour l’Islam, toute son attention se tourne vers les familles des parachutistes qui ont perdu leurs proches, vers les familles de ces jeunes enfants et de ce professeur mais également vers la Communauté Juive et le Corps Militaire dans son intégralité pour ces drames qui les traversent et les bouleversent.

Le Fondateur de la Communauté Musulmane Ahmaddiya [5] a affirmé dans son dernier ouvrage intitulé « Message de Paix » : « L’Islam est cette sainte et paisible religion qui n’a jamais attaqué le fondateur d’aucune autre communauté ou religion. Et le Coran est ce livre distingué qui a posé la fondation de la paix parmi les Nations et qui a reconnu les prophètes de chacune d’elles. […] Il n’accuse aucun d’entre eux de menteur ou d’imposteur; au contraire, il soutient que tous les pays, tous les peuples reçurent la visite des prophètes, posant ainsi la première pierre vers la construction d’une paix mondiale. »

Le Djihâd [6] contrefaçon

Au nom de quel principe Mohamed Merah a t-il légitimé ses actes ? Le Djihâd. Cette notion centrale de l’Islam, mal comprise, est devenue le centre de l’exégèse et de l’absurde. Elle est la base qui a permis à un mouvement extrémiste de se construire et de se développer en marge des doctrines classiques de l’Islam. Ces doctrines extrémistes qui consistent simplement à réciter benoîtement des versets, les sortir de tout contexte, pour les interpréter de la manière la plus absurde qu’elle puisse être, ne sont pas contributives à la paix entre les peuples et à la paix sociale. Au contraire, elles exhortent à la division ou à ce que pourrait appeler certains auteurs, le Fitna [7].

Quel est alors le véritable sens du Djihâd ? Est-il le Djihâd de Mohamed Merah qui, semble t- il, est le Djihâd de l’irrévérence et de l’inconnaissance ? Pourquoi devrait-on propager cet islam du sang, cet islam de la malice et des coups bas ? Mohamed Merah aurait t-il oublié de lire, dans sa formation accélérée de l’Islam, le verset [8] suivant : « 127. Et si vous voulez châtiez les oppresseurs, châtiez-les selon le tort qu’il vous a été fait ; mais si vous montrez de la patience, alors assurément cela est mieux pour ceux qui sont patients » « 128. Et, Ô Prophète, endure avec patience ; et en vérité, ta patience n’est possible qu’avec l’aide d’Allah. Et ne t’afflige pas pour eux et ne te désole pas à cause de leurs complots » « 129. En vérité, Allah est avec ceux qui sont justes et qui font le bien » ? Les jeunes enfants et le Professeur de l’école juive avaient-ils attaqué Mohamed Merah ? Avaient-ils fait du tort à ce dernier ? Qu’avaient fait les parachutistes à Mohamed Merah ? En réalité, c’est une lubie que s’est inventée Mohamed Merah pensant ainsi qu’il défendrait l’Islam alors qu’il n’en a que sali les magnifiques enseignements.

Mohamed Merah a agi au nom d’un Prophète qui a toujours été patient, lors même qu’il subissait des injustices. Ainsi en est t-il de l’épisode où le Fondateur de l’Islam qui passait, tous les jours, dans une rue se faisait assaillir d’ordures par une femme. Alors même qu’il avait la possibilité de réclamer justice, celui-ci fit preuve de patience. Le jour où la femme ne lui a pas jeté d’ordures, il s’est avéré qu’elle était malade et le Prophète est allé à sa rencontre et lui a demandé si elle se portait bien, qu’il s’inquiétait car il n’avait pas reçu d’ordures. N’est-ce pas là le véritable Islam, l’Islam de la patience et de la guerre sur soi-même ? N’est- ce pas là le message fondateur de la Tolérance ? Que de beaux messages dont Mohamed Merah s’est affranchi, pensant que le seul Islam est celui de la coercition, celui des armes et de la violence.

En réalité, comme la religion, le Djihâd qui a été présenté par Mohamed Merah est une contrefaçon. Comme l’affirme clairement le Fondateur de la Communauté Musulmane Ahmaddiya [9] « A cette époque, le Djihâd a pris une forme spirituelle qui consiste seulement à diffuser la signification réelle de l’Islam, à donner des réponses construites aux opposants en mettant en exergue les beautés de l’Islam et la véracité de son Fondateur. Voilà en quoi consiste le véritable Djihâd. »

L’Islam n’a jamais été la religion qui consiste à prendre les armes pour imposer sa volonté, son discours ou démontrer la véracité de sa religion. Au contraire, elle est la religion de la plume, du verbe, du débat et des arguments. Comme l’avait affirmé un des représentants de la Communauté Musulmane Ahmaddiya [10] : « l’épée peut faire courber les têtes mais pas les cœurs » ! Enfin, posons-nous cette question essentielle : si l’Homme a reçu l’enseignement de ce qu’il ne savait pas « par la plume » [11 ] comment pourrait-il l’imposer par la force des armes ? La plume a désormais plus de poids que l’épée, l’épée doit donc naturellement s’incliner.

Conclusion

Il est le propre de l’Homme de réaliser des assimilations, de se créer des préjugés. Seulement, concernant l’Islam, on remarque qu’il existe bien plus de contrefaçons que de modèles authentiques ; bien plus de mythes que de réalités. L’absence d’éducation, l’absence de connaissances précises de la religion créent des Mohamed Merah tous les jours, chaque minute, chaque seconde. La lutte contre ces personnes et ces doctrines est essentielle et devrait éveiller les convictions de toute personne qui n’a ne serait-ce qu’un atome de sympathie pour l’Humanité. Un des moyens de lutte contre ce phénomène est de l’isoler et de lui faire sentir que l’Islam n’est pas son point d’appui, n’est pas son accroche car, en réalité, l’Islam est et restera toujours la religion de l’Humanité, la religion qui proclame « l’Amour pour tous et la Haine pour personne [13] ».

Asif Arif [14]


  • 1 Pour cette note, je remercie, tout particulièrement, Mahrukh Arif, Audrey Vuillemenot, Rafla Ben Arous et Monsieur le Missionnaire de la Communauté Musulmane Ahmaddiya de France Nasseer Ahmad pour leurs contributions respectives.
  • 2 Prophète Muhammad.
  • 3 Bukhâri, Hadîth.
  • 4 Chapitre 2, verset 257.
  • 5 Mirza Ghulam Ahmad, né en 1835 à Qadian en Inde.
  • 6 Littéralement, la guerre sainte. L’arabe distingue entre la guerre sainte sur soi-même (Djihâd Al-Nafs) et la guerre sainte par l’épée (Djihâd Al-Quital).
  • 7 Gilles Keppel, Fitna. Guerre au cœur de l’Islam.
  • 8 Chapitre 16, versets 127, 128, 129.
  • 9 Mirza Ghulam Ahmad, lettre à Mir Nasseer Nawab Sahib, 14 août 1903.
  • 10 Mirza Tahir Ahmad, Problèmes des temps modernes ; les solutions de l’Islam.
  • 11 Sourate Al-Alaq, chapitre 96.
  • 12 Sourate Al-Alaq, précité.
  • 13 Devise de la Communauté Musulmane Ahmaddiya.
  • 14 Pour tout contact – asif.arif@laposte.net ; www.alislam.org.